10 11 2013 - Dévoilement d’une signalétique commémorative relatant l’épisode de la Résistance au cours duquel Jacques Delmas a adopté le nom de Chaban

Mis à jour le 11/01/2017
Saint Léon sur Vézère

Seul le prononcé fait foi.

Je suis très honoré de représenter M. Kader Arif, Ministre chargé des Anciens Combattants, à la commémoration de cet épisode de la Résistance au cours duquel le Résistant Jacques Delmas a choisi le nom de Chaban.

Cette commémoration est d’autant plus symbolique qu’elle se tient au moment où le Président de la République a lancé les célébrations du Centenaire de la Première guerre mondiale, qu’elle se tient dans l’année du 70° anniversaire de la Résistance intérieure et qu’elle correspond au jour anniversaire de la disparition de Jacques Chaban-Delmas.

Jacques Chaban-Delmas, le résistant

Ce nom du château de Chaban, qu’il gardera apposé à son patronyme toute sa vie et qu’il transmettra à sa famille, inscrit pour l’éternité la participation active de Jacques Chaban-Delmas dans la Résistance.

J’ai découvert M. Jacques Chaban-Delmas lorsque mes parents ont jugé que j’étais en âge de regarder avec eux le film « Paris brûle-t-il ? » réalisé par René Clément.

Je vivais alors avec fascination l’action du héros organisateur de la résistance et de la libération de Paris incarné par Alain Delon.

Plus tard, je me suis formé au métier des armes dans la même école que la sienne, l’Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr.

Son souvenir y est vivace, comme l’est celui de tous les élèves-officiers qui se sont formés pour partir immédiatement après au combat.

Après s’être battu dans le secteur des Alpes-Maritimes, le Sous-lieutenant Delmas apprend la fin des hostilités avec stupéfaction, allant jusqu’à éprouver « un malaise physique », je reprends ses termes, à l’idée de la défaite.

Furieux et déboussolé, il lui reste le sentiment d’un deuil incompréhensible, mêlant la colère, la honte et l’indignation.

Mais il éprouve avant tout une compassion déchirante pour cette figure maternelle que son pays a toujours représentée pour lui et, dès la fin juin 1940, il se sent possédé d’une volonté de revanche pour la réhabilitation de la France et de son peuple.

Il s’agit bien pour lui de redonner à la France sa gloire, sa splendeur et son renom.

De ce moment date son entrée dans la Résistance.

Alors, lorsque début août, il entend parler pour la première fois d’un Général au nom étrange qui invite les Français à se rassembler derrière lui pour continuer la lutte, l’avenir apparaît soudain à Jacques Delmas d’une grande clarté.

Comme c’est précisément son projet personnel, il décide de rejoindre le Général de Gaulle à Londres.

Il deviendra à partir de là le grand résistant que nous célébrons aujourd’hui encore, en ses qualités de membre du comité financier de la Résistance, de membre du Gouvernement provisoire de la République française, de responsable de la coordination militaire sur tout le territoire, il était général à 29 ans, et de responsable auprès de René Koenig du lien entre les Forces Françaises de l’Intérieur et le Haut Commandement interallié.

C’est lorsqu’il entre dans Paris aux côtés du Général Leclerc qu’il fait sa première rencontre physique avec le Général de Gaulle.

Général de Gaulle qui rend hommage à sa mobilisation pendant toute la Résistance en écrivant dans ses Mémoires de guerre :

« Chaban-Delmas se tenait au centre de tout. Perspicace et habile, ayant seul les moyens de communiquer avec l’extérieur, il contrôlait les propositions et, moyennant de longues et rudes palabres, contiendrait les impulsions du Conseil National de la Résistance et des comités. » 

 

La Résistance en Dordogne

Par son nom, Jacques Chaban-Delmas inscrit également dans l’Histoire l’importance qu’a eue la Résistance, ici, dans ce département de la Dordogne.

La Dordogne fait en effet partie des départements où les mouvements de Résistance ont été les plus actifs, avec la constitution de plus d’une centaine de groupes de maquisards répartis sur tout le territoire.

A la Libération, on dénombrait près de 30 000 résistants dans le Périgord, un tel nombre ayant permis au département de se libérer lui-même du joug nazi.

La Dordogne reste encore aujourd’hui marquée par les actes de la Résistance et les combats pour la libération.

Cette mémoire de la Résistance ne doit pas être oubliée.

Elle fait partie de l’Histoire de la Dordogne, de cette terre périgordine qui a vu le sang couler dans les combats contre l’occupant et pour la liberté.

Le souvenir de la lutte de ces résistants pour l’indépendance nationale doit être préservé et transmis aux nouvelles générations.

Cette commémoration et cette plaque en l’honneur de Jacques Chaban-Delmas sont elles-mêmes des armes de résistance : résistance à l’oubli, résistance à l’indifférence, résistance à la résignation. Elles doivent nous rappeler l’engagement, le courage et le sacrifice de ces hommes.   

 

Jacques Chaban-Delmas, l’homme d’Etat

Enfin, en tant que Représentant de l’Etat ici en Dordogne, département de la région Aquitaine, je veux célébrer la grandeur de l’homme d’Etat qu’était Jacques Chaban-Delmas :

C’est d’abord un homme qui s’est inscrit dans la durée : député pendant quarante-sept ans dont presque seize ans au perchoir de Président de l’Assemblée nationale, maire de Bordeaux pendant quarante-huit ans, cinq fois ministre, dont trois ans à Matignon.

Jacques Chaban-Delmas est aussi un homme qui s’est inscrit dans la modernité : je garde en mémoire son discours historique sur la Nouvelle Société prononcée en 1969 alors qu’il était Premier ministre. Ce discours reste d’une grande d’actualité. Jacques Chaban-Delmas y rappelait notamment que « la conquête d'un avenir meilleur pour tous justifie à elle seule tous les efforts, tous les changements ». Il faisait aussi le vœu que « le nouveau levain de jeunesse, de création, d'invention qui secoue notre vieille société » fasse « lever la pâte de formes nouvelles et plus riches de démocratie et de participation ».

Que son appel puisse continuer à être entendu.

Nous devons tous garder en tête, comme le salue le Général de Gaulle dans ses Mémoires d'espoir (1970), le souvenir d’un homme « venu tout jeune et d'un bond au premier rang de l'action dans la Résistance » et qui « est resté dans la politique, sans que les années semblent marquer son ardeur, ni son allure. »

La France doit garder en mémoire le souvenir d’un homme qui, comme le caractérisait le Général de Gaulle, était « ouvert aux contacts, éclectique quant aux idées, flexible dans les procédés », un homme « attaché à la cause du salut et du renouveau national », un homme dont « l’adresse va de pair avec son mérite sans estomper sa rectitude ».

Que notre salut aujourd’hui traduise l’estime et le respect dus à un serviteur exemplaire de l’Etat, dont la carrière s’est déroulée avec la fidélité pour vertu cardinale.

La fidélité à ses valeurs, la fidélité à sa ville de Bordeaux, la fidélité à son pays.

Une fidélité aussi aux hommes et une loyauté sans faille à un homme, le Général de Gaulle, rencontré pendant les heures sombres de notre Histoire et qu’il ne quittera plus.

Jacques Chaban-Delmas était de ceux qui nous poussent, comme il l’a écrit lui-même, à « croire en l'homme, à le respecter et à lui faire confiance ».

Comment pouvait-il en être autrement pour celui qui savait dès le départ que sa mission au service de ses compatriotes, au service de ses concitoyens était la seule qui pouvait apaiser cette faim d’engagement au service de l’intérêt général qui, bien au-delà du pain quotidien, tenaille les hommes éternellement dignes de ce nom.

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