concours de la force publique et expulsion locative

Mis à jour le 03/04/2017

La procédure menant à l'expulsion locative d'un locataire qui ne paye plus son loyer ou dont le logement n'est pas assuré, comporte plusieurs étapes.Il faut obligatoirement recourir à un huissier.

En effet, le propriétaire ne peut pas prendre l'initiative de pénétrer dans le logement avant l'intervention d'un huissier, faire changer la serrure et toucher aux meubles, sous peine de poursuites pour violation de domicile (3 ans d’emprisonnement et de 30 000 € d'amende).

Le propriétaire peut faire procéder à une expulsion si le locataire a des loyers impayés ou pour un défaut d’assurance.La résiliation du bail peut ensuite être prononcée automatiquement (en cas de clause résolutoire) ou suite à une décision de justice.

Si le locataire perçoit une aide au logement, le propriétaire peut obtenir de la caisse d'allocations familiales (Caf) qu'elle lui soit versée directement en tiers payant.

Le bail peut contenir une clause résolutoire indiquant que le bail sera résilié automatiquement si le locataire ne paie pas son loyer et ses charges aux échéances convenues. En pratique, cette clause existe dans la plupart des contrats de location.

Si le bail ne contient pas de clause résolutoire, le propriétaire doit directement assigner le locataire par acte d'huissier, devant le tribunal d'instance, pour demander la résiliation du bail et son expulsion.

I) Le commandement de payer

Avant la mise en œuvre de la clause résolutoire, le propriétaire doit envoyer au locataire un commandement de payer par acte d'huissier. C'est un acte par lequel l'huissier, qui aura été requis par le bailleur, ordonne au locataire de s'acquitter de sa dette.

Ce document reproduit, à peine de nullité, le texte des premiers alinéas de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989  et du second alinéa de l'article 6 de la loi du 31 mai 1990.

Le locataire dispose d'un délai de 2 mois pour régulariser sa situation en payant ce qui est dû. Durant ce délai, le locataire peut saisir le tribunal d'instance de son domicile pour demander des délais de paiement ainsi que le fonds de solidarité pour le logement.

Si un tiers s'est engagé comme caution du locataire, l'huissier lui signifiera obligatoirement le commandement. A défaut, la caution ne peut être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard.

 A la réception du commandement, le locataire dispose de deux mois pour s'acquitter de sa dette. Il peut également, dans ce délai, demander des délais de paiement. Plusieurs situations peuvent se présenter : 

- Le locataire s'acquitte de sa dette

S'il le fait dans les délais, les choses en restent là. Mais attention : si le locataire ne s'est pas acquitté de la totalité de la dette, il pourra être assigné en vue de son expulsion, même si la part restante est minime.

 - Le locataire demande des délais de paiement au juge

La demande de délais de paiement donnera lieu à une véritable instance à laquelle le locataire devra convoquer son bailleur devant le tribunal d'instance de son domicile. Il le fera par l'intermédiaire d'un huissier. Si ses ressources sont insuffisantes, il pourra demander l'aide juridictionnelle. 

Le juge appréciera la situation financière du locataire, mais également les besoins du bailleur, pour reporter ou échelonner le paiement des sommes dues dans la limite de deux ans. Ou pour refuser tout délai.

Si le locataire respecte les délais et les conditions fixées par le juge, la clause est réputée ne pas avoir joué : les droits du locataire ne sont plus remis en cause, et si un nouvel incident de paiement intervient, un nouveau commandement de payer devra être envoyé.

- Le locataire ne réagit pas

A l'expiration des deux mois, le bailleur pourra saisir le juge d'instance en référé pour lui demander de constater que le contrat est résilié et de prononcer l'expulsion. Si le bailleur est un organisme HLM Habitations à loyer modéré, il devra auparavant saisir la commission départementale des aides publiques au logement pour assurer le maintien de leur versement, et il ne pourra délivrer une assignation moins de trois mois après cette saisine.

À l'issue du délai de 2 mois (ou du délai de paiement accordé par le juge), le propriétaire doit saisir le tribunal d'instance pour lui demander de constater que le bail est résilié et prononcer l'expulsion. Il peut le saisir en référé.

Le juge peut encore accorder des délais de paiement au locataire pouvant régler sa dette locative. Durant ce délai, les effets de la clause résolutoire sont suspendus. Si le locataire paye sa dette dans le délai, il peut rester dans le logement.

II) Décision judiciaire

A) L’assignation en référé

Le bailleur doit alors assigner en référé le locataire devant le juge d’instance du lieu de situation de l’immeuble pour faire constater la résiliation du bail et demander sa condamnation provisionnelle au paiement des arriérés de loyer.
 Attention, l’assignation doit être notifiée également au préfet (par lettre recommandée avec A.R) deux mois au moins avant l’audience.

B) L’ordonnance d’expulsion

L’autorité judiciaire prend une ordonnance. Une fois celle-ci rendue, il faut la notifier au locataire.

III) L’exécution de l’expulsion

A) le commandement à quitter les lieux

Une fois cette décision de justice ordonnant l’expulsion du locataire et sa condamnation aux arriérés de loyer, il faut faire délivrer un commandement d’avoir à libérer les locaux dans les deux mois par acte d’huissier.
 Il faut notifier (par lettre recommandée avec A.R) le commandement au Préfet et attendre deux mois.

 L’article L 412-1 du Code des procédures civiles d’exécution interdit en effet toute expulsion avant l’expiration d’un délai de deux mois suivant le commandement d’avoir à libérer les lieux, dès lors que l’expulsion porte sur un local affecté à l’habitation principale de la personne expulsée ou de tout occupant de son chef. Il s’agit pour la personne expulsée d’organiser son relogement et son déménagement. Ce délai est de rigueur et son non-respect peut entraîner la nullité de la procédure.

Mais le locataire a encore la possibilité de demander des délais soit au juge des référés après l’ordonnance d’expulsion, soit au juge de l’exécution (JEX au TGI Tribunaux de grande instance) après la signification du commandement d’avoir à libérer les locaux (délai de grâce).
 L’article L 412-3 du Code des procédures civiles d’exécution donne la faculté au juge d’accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d’un titre à l’origine de l’occupation.

La durée de ces délais ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement.
 Ces délais supplémentaires sont donc accordés aux personnes de bonne foi car le premier délai légal de deux mois ne peut être réduit ou supprimé qu’en cas de voie de fait (notamment pour les squatteurs).
 Ces délais sont cumulatifs et se combinent avec la trêve hivernale prévue à l’article L 613-3 du code de la construction et de l’habitation.

B) la tentative d’expulsion

Plusieurs cas de figure peuvent se présenter le jour de l'expulsion :

- le locataire n'émet aucune protestation pour quitter les lieux : l'huissier dresse un procès-verbal dans lequel il procède à l'inventaire des meubles et indique les lieux où ils sont déposés et récupère les clés du logement ;

- Le locataire est absent ou l'huissier rencontre une résistance

L'huissier ne peut lui-même user de la force si le locataire est absent ou en cas de résistance (refus d'ouvrir la porte, refus de partir, opposition du voisinage). Il doit requérir le concours de la force publique. Il dressera alors un procès-verbal de tentative d'expulsion et demandera l'assistance du commissaire de police ou d'un officier de gendarmerie.

- Le locataire a déjà quitté les lieux

L'huissier peut alors entrer dans le logement avec l'aide éventuelle d'un serrurier "pour constater que la personne expulsée et les occupants de son chef ont volontairement libéré les locaux". Il doit pour cela être accompagné du maire de la commune, d'un conseiller municipal ou d'un fonctionnaire municipal, d'une autorité de police ou de gendarmerie ou, tout simplement, de deux témoins (articles 21 et 21-1 de la loi du 9 juillet 1991).

Le propriétaire ne peut pas prendre l'initiative de pénétrer dans le logement avant l'intervention d'un huissier, faire changer la serrure et toucher aux meubles, sous peine de poursuites pour violation de domicile (3 ans d’emprisonnement et de 30 000 € d'amende)

Aucune expulsion ne peut intervenir pendant la période dite de trêve hivernale allant du 1er novembre au 31 mars, sauf si l'expulsion est engagée à l'encontre :

  • d'un locataire qui loue un logement dans un immeuble qui a fait l'objet d'un arrêté de péril,
  • ou d'un locataire dont l'expulsion est assortie d'un relogement correspondant à ses besoins familiaux (le nombre de pièces doit correspondre au nombre d'occupants).

L'expulsion sera alors effective dès la fin de la trêve.

C) La demande de concours de la force publique

Après la tentative d’expulsion, l’huissier devra adresser au Préfet une demande de concours de la force publique.

C'est alors au préfet qu'il appartiendra d'accorder ou de refuser ce concours, compte tenu des risques que l'expulsion présente pour l'ordre public.

En cas d’accord de concours de la force publique, l’huissier est assisté par les forces de l’ordre et procède à l’expulsion du locataire.